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Le jeu de l’oie
au musée

Un objet frontière

À l’origine de la collection de jeux de l’oie du Mucem, il convient de rappeler l’intérêt pour les cultures populaires qui voit le jour, entre 1936 et 1939, sous le gouvernement du Front Populaire. C’est à cette époque qu’est préfiguré à Paris le Musée national des Arts et Traditions populaires, sous la direction de Paul Rivet et Georges Henri Rivière. Après la Seconde guerre mondiale, ce musée s’emploiera à collecter des objets ethnographiques venus des différentes régions de France, donnant une place importante aux témoignages des cultures ludiques et festives.

Au début des années 1950, une importante enquête est menée par Pertev Boratav et Hélène Trémaud au Musée national des Arts et Traditions populaires autour de l’exposition « Jeux de force et d’adresse dans les pays de France ». La méthodologie de cette exposition qui ouvre en 1957 inspire encore les travaux actuels. Dès 1954, des questionnaires sont envoyés, via le Ministère de l’éducation nationale, aux inspecteurs d’académie et aux services académiques et départementaux de la jeunesse et des sports, afin de recueillir une « énumération détaillée des jeux et sports, de caractère régional ou local, qui se pratiquaient naguère et dont le souvenir est toujours vivant ou qui sont pratiqués actuellement dans une région, une académie ou un département déterminés ». En réponse à cette campagne de questionnaires, 38 départements transmettent des listes de jeux, parfois accompagnées de mémoires d’érudits locaux et de listes d’informateurs, permettant de nouer des relations avec les 200 prêteurs qui contribueront à l’exposition de 1957. À la suite de l’exposition, le Musée national des arts et traditions populaires se dotera d’un département « jeux », animé par Hélène Trémaud qui prolongera ses enquêtes dans les années 1960, notamment autour des différentes variantes de jeux de quilles et autour du cas des joutes nautiques. La perspective théorique est à cette époque largement inspirée par le structuralisme ; elle s’intéresse surtout à établir une classification générale des jeux traditionnels.

La collection de jeux de l’oie du Mucem, héritée du Musée national des Arts et Traditions populaires, comprend plusieurs dizaines de jeux et documents collectés entre 1950 et 1995.

En dehors du Mucem, la plus grande collection française est conservée à Rambouillet, commune qui est devenue propriétaire de la collection constituée par le polytechnicien Pierre Dietsch (mort en 1999), l’une des plus importantes au monde, avec 2500 jeux. La Bibliothèque nationale de France possède près de 650 jeux. Ils sont conservés dans la série Kh du département des Estampes, relative aux estampes figurant des jeux, ainsi que dans les collections De Vinck et Hennin, qui rassemblent des milliers de documents iconographiques (estampes, dessins, affiches, photographies) relatifs à l’histoire de France. Michel Hennin (1777-1863) a rassemblé de son vivant près de 15 000 pièces traitant de l’histoire de France jusqu’au Second Empire, tandis que le diplomate Carl de Vinck (1859-1931) a constitué une collection deux fois plus importante sur une période plus restreinte, s’étendant de 1770 à la Commune de Paris.

Enfin, on trouve de nombreux jeux de l’oie au Musée national de l’éducation (Rouen), au Musée Carnavalet (Paris) ou dans les bibliothèques municipales.