C. Fayein

Fonds Claudie Fayein
En 2014, la famille de Claudie Fayein dépose, à la Médiathèque de la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (MMSH), ses archives sur le Yémen des années 1950-1993. Ce fonds est composé d’archives de terrain (23 dossiers/2 ml) et de plus de 3 000 photographies (diapositives couleur 24x36) ainsi que de tirages noir et blanc pour les clichés les plus anciens.

Article : "J'ai visité Mareb l'interdite, antique capitale de la Reine de Saba", Sciences et voyages
Claudie Fayein Grand prix du reportage documentaire 1952-1953

pour son article :  "J'ai visité Mareb l'interdite, antique capitale de la Reine de Saba", Sciences et voyages, n° 86, février 1953.

Lire l'article

Claudie Fayein (1912-2002), médecin et ethnologue

Médecin engagée socialement et politiquement, Claudie Fayein s’est portée candidate dès 1951 auprès du ministère des Affaires étrangères pour un poste au Yémen. Afin de se préparer à cette entreprise, elle décida durant l’année 1950 de se familiariser avec l’ethnologie en suivant les cours de Claude Lévi-Strauss au Musée de l’Homme. Elle compléta cette formation par des cours d’arabe et un diplôme de médecine tropicale.
Elle quitta Paris en janvier 1951 pour s’aventurer seule, pendant dix-huit mois, dans ce lointain royaume d’Arabie, investie d’une double mission : l’une médicale, offerte par l’Imam Ahmed, l’autre ethnologique, patronnée par Claude Lévi-Strauss. Le 25 janvier, elle débarqua à l’aéroport d’Aden. Après une quinzaine de jours passés à Taez, alors résidence de l’Imam et capitale du Yémen, elle poursuivit son voyage en passant par Zabîd, Hodeïda et Madînat al-‘Abîd, avant d’arriver le 20 février à Sanaa, où elle s’installa. Elle y fréquentait quelques rares étrangers italiens, égyptiens ou palestiniens qui travaillaient comme techniciens ou médecins. Mais ses relations sociales, elle les tissait surtout avec les Yéménites : avec des notables de la ville ou avec des gens de condition plus modeste.
Le 18 avril 1952, sa première mission au Yémen prit fin. À son retour en France, sa passion pour l’ethnologie l’amena à poursuivre sa formation dans cette discipline, puis à réaliser des enquêtes ailleurs dans le monde. Mais elle consacra surtout son temps à faire connaître le Yémen. En 1953, elle décrivit, pour un concours de reportage du magazine Sciences et Voyages, sa visite à Mareb, ville du Royaume de Saba. Lauréate du concours de reportage proposé par la revue, elle remporta le prix de 50 000 francs qu’elle consacra à l’achat de médicaments pour le Yémen. Elle multiplia les conférences, organisa à Paris au Musée de l’Homme une exposition sur le pays avec les objets et les photos qu’elle en avait rapportés. Dans son ouvrage Une Française médecin au Yémen (1955), elle relate sa rencontre avec les Yéménites qu’elle a su apprécier et aimer, sans pour autant taire ce qui la heurtait. Traduit en arabe par Muhsin al-‘Ayni, le livre de Claudie Fayein a été publié à Beyrouth en 1960 et a été diffusé au Yémen depuis Aden, notamment dans les cercles des opposants au régime.
Après le renversement de l’imamat en 1962, Claudie Fayein avait hâte de découvrir le « nouveau Yémen ». Mais la longue guerre civile qui avait suivi le changement de régime l’obligea à patienter. Le 1er octobre 1969, elle rouvrit son carnet personnel pour y noter directement, à la suite du 18 avril 1952, la date de son retour au Yémen. Cette seconde mission était médicale, mais aussi anthropologique.
Le Yémen était alors en pleine mutation. Ses nouveaux dirigeants amorçaient la reconstruction de l’État qu’ils entendaient asseoir sur une identité forte, capable de rassembler autour de la toute jeune République l’ensemble des populations du pays. Dans cette perspective, Muhsin al-‘Ayni, alors premier ministre, confia à Claudie Fayein la mission de contribuer, en tant qu’ethnologue, à la création à Sanaa d’un musée national. Elle reprit donc le service médical dans l’hôpital tout en effectuant parallèlement de multiples voyages dans les différentes régions du Yémen pour collecter les objets qu’elle comptait exposer dans le musée en cours de constitution.
Le musée fut créé dans le palais de Dâr al-Shukr à Sanaa. La section archéologique ouvrit ses portes en 1971 et les premières salles de la section ethnologique organisées par Claudie Fayein furent inaugurées en 1972. Jusqu’en 1981, au cours de missions régulières au Yémen, elle continua à rassembler des objets et à aménager de nouvelles salles dans le musée, dont une consacrée aux cérémonies du mariage.
En hommage aux services rendus à leur nation, les autorités yéménites proposèrent à Claudie Fayein l’honneur exceptionnel, pour une étrangère non arabe, de porter la nationalité yéménite. Elle l’accepta avec fierté en 1990, lorsque les deux Yémen réalisèrent l’unité qu’elle avait si ardemment souhaitée. Et c’est avec un passeport yéménite qu’elle effectua du 17 au 19 octobre 1993 son ultime voyage à Sanaa.

D’après :
Michel Tuchscherer, Le Yémen et les Yéménites tels que les a vus, décrits et aimés Claudie Fayein, Sanaa, CEFAS, 2012, 215 p.



Bibliographie

Ouvrages :

Claudie Fayein, Une Française médecin au Yémen, Paris, René Julliard, 1955, 301 p.
Claudie Fayein, République arabe du Yémen, République démocratique et populaire du Yémen, Petite Planète, 1975, 188 p.
Poèmes de la révolution yéménite de Ali Ahmed Afif, Abdallah al-Baradduni, Ali Abdallah Fayçal, Mohamed Abduh Ghanem... [etc.], recueillis par Étienne Renaud et Claudie Fayein, traductions de Badr-el-Dine ARODAKY, Férial DROSSO, Hayat EL HINY, Bénédicte LANDRON (et al.), Paris, Éditions Recherches, 1979.
Nagiba. Vies de femmes au Yémen, récits de Nagiba publiés par Claudie FAYEIN, Paris, L’Harmattan, 1990, 103 p.

Articles de Claudie Fayein :

- « J’ai visité Mareb l’interdite, antique capitale de la reine de Saba », Sciences et voyages, n° 86, février 1953, p. 3-9.
- « Populations des hauts-plateaux yéménites (Arabie du Sud) », communication présentée lors de la séance du 19 mai 1954, p. 13-14, Comptes rendus sommaires des séances de l’Institut français d’anthropologie, 8e fascicule, janvier-décembre 1954
- « À propos d’une exposition du Musée de l’Homme. Mission médicale française au Yémen », Concours médical, n° 19, 8 mai 1954, 4 p.
- « Une française en Arabie », Réalités, 1re partie n° 101 juin 1954, p.62-67 ; 2e partie n° 102 juillet 1954, p. 50-55.
- « La construction au Yémen », Bâtir, n° 44, novembre 1954, p. 36-41.
- « Une Française au Yémen », Comptes rendus mensuels des séances de l’Académie des sciences coloniales, t. XV, séances des 4 et 18 novembre 1955, p. 479-490.
- « Le Musée national du Yémen, Sana’a », Museum, vol. XXIV, n°2, 1972, p. 122-124.
- « Al Zohrah. Village de la Tihâma », Objets et mondes, t. XIII, fasc. 3, automne 1973, p. 161-172.
- « Un médecin conseil au Yémen », Revue médicale de l’assurance maladie, 3, 1976, p. 65-71.
- « Noces à Keilan », Ulysse, La revue du voyage culturel, n° 12, avril-mai 1990, p. 13-15.

© MMSH - IREMAM, 2021 - Une réalisation de la Cité numérique de la Méditerranée