A. Nu‘mân

Fonds Ahmad Muhammad Nu‘mân
Ce fonds, dont les premiers documents ont été rassemblés au sein de la famille Nu‘mân au début du XXe siècle, a été déposé en 2009 à l’Institut de recherches et d’études sur les mondes arabes et musulmans (IREMAM) par les descendants d’Ahmad M. Nu’man. Il est composé d’environ 80 000 pages de documents (correspondances, notes, discours, articles de presse, carnets personnels, etc.), d’un millier de photographies et d’une petite bibliothèque de deux centaines d’ouvrages. Une partie des documents a été photographiée sur microfilm et cataloguée une première fois en 1969 à l’Université Américaine de Beyrouth, et l’ensemble fait actuellement l’objet d’un nouveau catalogage et d’un programme de numérisation mené par l’Iremam et la Médiathèque de la MMSH, en collaboration avec le CEFREPA (Centre français de recherche de la péninsule Arabique).

Ahmad Muhammad Nu‘mân (1909-1996), professeur et homme politique de premier plan au Yémen

Celui qui fut connu sous le titre de « Professeur » (« al-Ustâdh ») et comme le fondateur d’une des premières écoles modernes durant les dernières années de l’imamat zaydite du Yémen, fut un chef de file du mouvement de réforme éducative, politique, sociale et culturelle engagé pour alléger la politique ultraconservatrice et isolationniste de l’imamat, jusqu’à l’avènement de la république en 1962. En 1944, il s’enfuit à Aden (sous protectorat britannique) où il fonda, avec son compagnon de lutte Muhammad al-Zubayrî et le groupe dit « des Yéménites Libres » et le journal contestataire Sawt al-Yaman. Après l’assassinat de l’Imam Yahya en 1948, il rentra au Yémen et fut, sur ordre de l’Imam Ahmad, jeté en prison dans le nord du pays, à Hajja, jusqu’en 1955. Puis, malgré la confiance que lui accordait le nouvel Imam, il s’enfuit au Caire d’où il organisa l’opposition avec ses compagnons de lutte. Après la révolution de 1962 et le début de la guerre civile, Ahmad Muhammad Nu‘mân fut nommé Premier ministre (1965), mais, tout en défendant la jeune république contre un retour à l’imamat, il s’opposa à l’interventionnisme belliciste de l’armée égyptienne au Yémen. En raison de ses positions en faveur d’une conciliation entre républicains et « royalistes », il fut arrêté avec son gouvernement et emprisonné au Caire pendant un peu plus d’un an. Libéré après l’écrasement de l’armée égyptienne par Israël en juin 1967, il se réfugia à Beyrouth, avant d’accepter la vice-présidence de la République du Yémen en 1974. La même année, l’assassinat de son fils Muhammad le décida à se retirer de ses fonctions, et il s’exila en Arabie Saoudite. Il ne disparut jamais des débats politiques yéménites, même après 1987 et son départ pour Genève, où il s’installa de manière définitive pour raisons médicales.
À la mort d’Ahmad Nu‘mân en 1996, sa dépouille fut transportée à Sanaa, où des obsèques nationales furent organisées par le Président Ali Abdallah Saleh, et, en 2009, un grand colloque national fut organisé à l’université d’Aden sur son rôle dans la modernisation du Yémen.

Juliette Honvault


Bibliographie

Mudhakkirāt Aḥmad Muḥammad Nuʻmān : sīrat ḥayātihi al-thaqāfīyah wa-al-siyāsīyah (Les Mémoires d’Ahmad Muhammad Numân : sa vie culturelle et politique), Ali Muhammad Zayd (ed.), Maktabat Madbūlī, Le Caire, 2003
François Burgat, « Aḥmad Muḥammad Nu‘mân et la construction d’une identité nationale yéménite », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée [En ligne], 121-122 | avril 2008. URL : http://journals.openedition.org/remmm/4953 ; DOI : https://doi.org/10.4000/remmm.4953
Juliette Honvault, « Aḥmad Nu‘mān, Beyrouth 1969 : l’improbable Yémen », Arabian Humanities [En ligne], 1 | 2013. URL : http://journals.openedition.org/cy/1957 ; DOI : https://doi.org/10.4000/cy.1957
Juliette Honvault, « Digitization of contemporary Yemeni archives in exile. The “Ahmad Muhammad Nu‘mân’s papers” challenge », Égypte/Monde arabe, 2020/2 (n° 22), p. 107-121. DOI : 10.4000/ema.13181. URL : https://www.cairn.info/revue-egypte-monde-arabe-2020-2-page-107.htm

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